FMI : Le monde marche sur la tête

Décidément, à Davos, rien n’allait plus. Le lustre de la réunion de l’intelligentsia politique et économique a cédé la place à un parterre de mines renfrognées, minées par un an et demi de crise économique et Dieu sait encore combien devant nous.

La jet-set endimanchée avait déserté les hôtels de la petite cité helvète, signe que l’humeur n’est plus au show-biz mais au business.

Et le représentant du Fonds monétaire international, John Lipsky, a failli provoquer quelques crises cardiaques supplémentaires en annonçant que le prêteur en dernier ressort de la planète voulait renflouer son petit cochon.

Non pas que le FMI manque d’argent, s’est empressée de rassurer l’instance internationale. Elle qui a déjà prêté 50 milliards de dollars pour aider plusieurs pays l’an dernier – mais, on n’en attendait pas moins d’elle – peut encore débourser près de 250 milliards pour de nouveaux subsides.

Non, c’est plutôt d’une amère prise de conscience qu’il s’agit. L’organisme de Bretton Woods semble enfin se rappeler les tristes heures du sortir de la guerre, alors que les canons résonnaient encore, et qui avaient amené à sa création.

L’optimisme qui prévalait jusqu’à l’automne dernier n’est plus. Le FMI vient de réviser à la baisse ses perspectives de croissance mondiale pour 2009, acceptant enfin d’affronter en face l’ampleur de la situation.

Le Fonds admet également qu’il lui faudra renouer avec ses anciennes prérogatives. Il y a peu, le FMI pointait presque au chômage, ses anciens clients ayant terminé leur CDD ou l’ayant rompu. La structure cherchait même une reconversion. Pourquoi pas dans la surveillance et le contrôle du système financier mondial, songeait-elle. Il y a de quoi rire jaune aujourd’hui.

Le « pompier pyromane », ainsi surnommé par ses détracteurs qui accusaient ses méthodes de gestion d’aggraver le mal au lieu de le soigner, reprend du service. Il a aidé quelques petits pays l’an passé : la Hongrie, la Serbie, le Pakistan ou, encore, l’Islande. Il s’attend à être à nouveau sollicité par les économies émergentes au bord de la noyade. Il s’attend surtout – et c’est là bien plus inquiétant – à l’être par de nouveaux mendiants, issus des pays désormais anciennement riches. Bref, de chez nous.

Les communicants du FMI ont beau se cacher derrière des termes tels que « mesure contingente », « il est prudent en ces temps-ci »…, le couperet n’en est pas moins tranchant.

Le FMI veut être prêt pour répondre aux SOS. Il a donc lancé à un appel aux dons, ou plutôt aux prêts. Le Japon, loin de se sortir brillamment de la situation actuelle, a promis une centaine de milliards de dollars. Le solde, le FMI envisage de le rassembler en lançant une émission obligataire, ce qui serait une grande première.

Quelles leçons faut-il tirer des quelques minutes de discours du représentant du FMI à Davos ? La première : que l’on a peut-être encore rien vu.

La seconde : que l’on a, en réalité, encore rien vu si on en arrive au stade où ce sont les Etats mal en point qui doivent alimenter les coffres-forts du banquier mondial afin d’espérer bénéficier de son aide financière. Un peu comme si nous, contribuables, prêtions de l’argent à nos banques dans l’espoir qu’elles daignent bien en retour nous accorder un prêt immobilier. « Toute ressemblance avec des faits réels ne saurait être que fortuite », lirait-on à la fin d’un bon film. Malheureusement, nous sommes bien les acteurs de ce « nanar ». Décidément, on marche sur la tête.

 Alexandra Voinchet