Le yoyo boursier n’en finit plus…

Depuis un peu plus de deux mois, le Cac 40 est devenu une véritable girouette : – 23,9 % du 1er au 27 octobre, + 20,3 % au cours des six jours suivants, – 21,9 % du 5 au 21 novembre, + 13,2 % la semaine suivante, – 8,4 % ensuite et enfin + 4,5 % la semaine dernière. Lorsqu’en septembre dernier, nous écrivions que les amateurs des montagnes russes seraient gâtés sur les marchés boursiers, nous étions loin d’imaginer que la volatilité de ces derniers serait si forte.

Et pour cause : depuis la faillite de Lehman Brothers et la panique qui en a découlé, les investisseurs et autres intervenants sur les marchés ont perdu tous leurs repères. Si bien que leur horizon de placement s’est considérablement réduit. En effet, celui-ci ne se mesure plus en mois (comme le voudrait le fonctionnement normal des marchés boursiers), ni en semaines, ni même en jours, mais en heures. Dès lors, toute nouvelle économique, financière ou politique donne lieu à une sur-réaction extrême dans une proportion rarement rencontrée.

La raison de court-termisme viscéral est malheureusement simple : ayant perdu tous leurs repères depuis le 15 septembre, évoluant dans un brouillard complet, les investisseurs n’ont plus la possibilité matérielle de se projeter dans un avenir qui dépasse la semaine. Dès lors, ils naviguent à vue, en espérant ne pas tomber sur un récif inattendu. Le problème réside dans le fait qu’un tel comportement revient à fragiliser l’ensemble des acteurs économiques et financiers, d’où un nouvel épaississement du brouillard and the beat goes on…

Une question angoissante se pose alors : quand et comment allons nous sortir de ce cercle pernicieux ? Ne soyons pas dupes, cela prendra du temps. Et pour cause : toute inflexion de politique économique prend six à neuf mois pour agir sur l’activité. Ainsi, la baisse des taux directeurs de la Fed du début 2008 commence seulement à produire ses effets depuis quelques semaines. De même, la baisse du taux refi de la BCE ou encore la dépréciation de l’euro n’agiront vraiment qu’à partir de l’été prochain.

A fortiori et même si leur impact sur l’activité est un peu plus rapide que celui de la politique monétaire, les plans de relance budgétaires de l’activité n’ayant pas encore vu le jour (ils ne seront engagés qu’à partir de janvier-février 2009 des deux côtés de l’Atlantique), ils ne produiront leurs effets qu’à partir du printemps prochain au plus tôt. Il ne faut donc pas être trop pressés. C’est d’ailleurs là que se situe toute la difficulté, car les marchés n’ont aujourd’hui plus le temps d’attendre.

Pour autant, si nous réussissons simplement à laisser du temps au temps, alors tout devrait progressivement se rétablir. En attendant, les marchés devraient retrouver du grain à moudre assez rapidement par d’autres voies. Tout d’abord, l’impact de la baisse du baril est quasiment immédiat sur l’inflation, donc sur le pouvoir d’achat et enfin la consommation.

Dans ce cadre, des bonnes nouvelles économiques pourraient se produire dès la fin 2008 et le début 2009. Ensuite, et cela a déjà commencé, les grandes entreprises réussissent à lever des fonds sans trop de difficultés sur les marchés obligataires. Certes, avec des taux d’intérêt très élevés. Mais si nous étions vraiment dans une grave dépression et que les entreprises étaient à l’article de la mort, de telles émissions n’auraient certainement pas lieu.

Parallèlement, les mouvements de fusions-acquisitions et d’OPA commencent à se développer, confirmant là aussi que le marché est loin d’être mort. Autrement dit, la multiplication de ces opérations financières permettra progressivement de restaurer la confiance.

Et ce d’autant, qu’après presque deux ans de profit warning, le plus dur semble passé en la matière. Certes, les secteurs de la construction et de l’automobile risquent encore de souffrir. Néanmoins, compte tenu du cost cutting effréné mené un peu partout, le simple maintien d’un chiffre d’affaires honorable devrait permettre d’afficher des résultats plus que satisfaisants en 2009.

Enfin, la baisse des taux monétaires (qui réduira mécaniquement l’appétence pour les produits du même nom), le fort risque de remontée des taux d’intérêt des obligations d’Etat dans le sillage des dérapages budgétaires et le prolongement de la baisse des cours des matières premières et des prix immobiliers (en particulier en Europe où la bulle ne s’est pas encore complètement dégonflée) devraient permettre de conférer aux marchés actions le meilleure couple rendement-risque.

N’oublions pas que la confiance est une alchimie qui est très difficile à obtenir et qui peut s’effondrer du jour au lendemain, mais qui prend du temps et se reconstituer.

Dans ce cadre, si nous réussissons à oser adopter un horizon de placement qui dépasse les six mois, les opportunités boursières ne font plus aucun doute. Dans ce monde qui va de plus en plus vite, la valeur clé réside donc bien dans le facteur temps. Et chacun sait que justement le temps c’est de l’argent…

Marc Touati