Les ménages sont formidables. En effet, qu’ils soient américains, allemands ou français, ils refusent de céder au pessimisme et indiquent une légère amélioration de leur moral dans les enquêtes de conjoncture menées auprès d’eux. Certes, aux Etats-Unis, un effet Obama a certainement joué permettant par là même aux Américains de retrouver quelques couleurs. A l’inverse, que ce soit en Allemagne et en France, aucun effet de ce genre n’est observable, même s’il est vrai que les Français pourraient trouver satisfaction à voir leur Président mis en valeur sur la scène internationale lors de la crise financière.
Toujours est-il que dans un contexte d’augmentation du chômage, de morosité exacerbée des entreprises, l’augmentation du moral des ménages a de quoi surprendre. Ainsi, après avoir augmenté de deux points en octobre, l’indice de confiance des ménages français en a gagné 3 en novembre. Avec un niveau toujours très bas de -43, cet indice retrouve ainsi un « plus haut » depuis mai 2008.
Cette amélioration est d’autant plus remarquable que la quasi-majorité des indices de l’enquête s’améliore. A commencer par les indicateurs de situation financière personnelle et de niveau de vie en France. Seule ombre persistante au tableau, les ménages craignent de plus en plus une augmentation du chômage dans les prochains mois.
Mais globalement, ce retour de l’espoir tranche avec l’effondrement du moral des chefs d’entreprise. En novembre, ce dernier a ainsi atteint un plus bas depuis octobre 1993. Pis, les perspectives générales de production des industriels français ont atteint un plus bas historique, jamais rencontré depuis la création de l’enquête INSEE dans l’industrie en 1976…
Une question s’impose alors : les ménages français sont-ils sont prozac ou bien sont-ce les chefs d’entreprise, les investisseurs financiers et les hommes politiques qui ont sombré dans un comportement dépressif et suicidaire ?
En fait, la réalité est certainement entre les deux. En effet, les entreprises et les marchés ont évidemment de quoi s’inquiéter. Dans ce cadre, les ménages ont raison de se soucier davantage des risques de chômage.
Pour autant, tout n’est pas si noir que certains voudraient nous faire croire. En effet, les cours du pétrole et des matières premières sont en nette baisse. Et même si ces évolutions favorables ne sont pas complètement répercutées sur les prix à la consommation, elles jouent mécaniquement à la hausse sur le pouvoir d’achat des ménages.
Parallèlement, si les banques restent encore très frileuses en matière de crédit, la forte baisse des taux monétaires passée et à venir soutiendra forcément l’activité économique dans les prochains mois. C’est du moins ce que laissent penser les déclarations des responsables de
Dans la mesure où ces évolutions mettront environ six mois pour agir sur l’activité, la zone euro est donc condamnée à passer l’hiver en récession avant un timide et progressif rebond à partir de l’été prochain. Autrement dit, elle connaîtra une récession de plus d’un an, c’est-à-dire une récession historiquement longue.
Voilà pourquoi, après avoir pêché par excès de méthode Coué, nos gouvernants sont aujourd’hui tombés dans un excès inverse, voulant à tout prix noircir le tableau pour justifier la forte augmentation des dépenses publiques.
Soyons clairs : cette recrudescence est dangereuse. N’oublions pas que les dépenses publiques représentent déjà 53,5 % du PIB français (jusqu’où va-t-on aller ?). Néanmoins, il est tout aussi évident qu’à court terme, l’activité économique et l’emploi vont bénéficier de cette fièvre dépensière des autorités publiques.
Dans ce cadre, les ménages font finalement le même calcul que les marchés depuis quelques mois : ils ne pensent qu’à court terme. Autrement dit, « profitons de la situation présente tant que nous le pouvons, quant à l’avenir, les incertitudes sont tellement fortes qu’il ne sert à rien de sombrer dans le pessimisme ». C’est en substance ce que nous disent aujourd’hui les ménages français, ainsi que leurs homologues américains et allemands : Carpe Diem.
Ils nous donnent donc une leçon formidable de sang froid. Espérons que les entreprises et les investisseurs financiers sauront s’en souvenir.
Si tel est le cas, alors les économies occidentales pourront progressivement retrouver le chemin du cercle vertueux investissement-emploi-revenu-consommation. Car n’oublions pas que la consommation seule ne suffit par à tirer une économie. Et pour cause : lorsqu’un Français achète 100 euros de produits, 50 euros sont absorbés par des produits importés. Dès lors, ce qui est gagné en consommation est en partie perdu en importations. Voilà pourquoi, il n’est pas possible de se contenter de la résistance des dépenses des ménages. Simplement, ces derniers sont en train d’ouvrir la voie aux entreprises et aux industriels pour ne pas céder à la tentation du pessimisme maladif.
En attendant, même s’ils réduiront la voilure, les ménages devraient nous réserver d’autres bonnes surprises, notamment parce qu’ils consommeront significativement pendant les fêtes de fin d’année et les soldes de janvier. Ce qui dans le contexte de déprime actuel, constitue d’ores et déjà un rayon de soleil particulièrement appréciable.