Lorsque je vivais en Espagne – entre 2002 et 2003 -, les grues poussaient comme des champignons aux abords de Madrid. On construisait alors à tour de bras des immeubles de standing : halls d’entrée en marbre, appartements spacieux avec vue sur le jardin et
En 2003, l’éclatement de
Mais les raisons de ce dynamique début de XXe siècle sont aussi conjoncturelles : la réforme du marché du travail et la flambée du secteur de la construction, l’investissement résidentiel étant tiré par des crédits facilités mais à taux variables, ont dopé la création d’emplois. Parallèlement, les mesures politiques de baisses d’impôts, l’accroissement du pouvoir d’achat, ont tiré la consommation à la hausse donc l’investissement productif… Un cercle vertueux.
Ce système auto-générateur a d’un coup cessé de fonctionner en 2008. Aujourd’hui, les particuliers sont étranglés par la dette contractée pour des achats résidentiels parfois démesurés. Leur porte-monnaie souffre de l’inflation. Les chantiers stoppés net, les ouvriers ont été remerciés et sont venus grossir les rangs des chômeurs. La consommation peine. Les débouchés des sociétés se sont réduits comme peau de chagrin et le nombre des défaillances d’entreprises a explosé… Le cercle est devenu vicieux.
Voilà le retour des déboires économiques, comme en 1992-
Le taux de chômage a déjà grimpé à plus de 11 %, selon des données de
Les quatre plans de soutien annoncés successivement par le gouvernement Zapatero, comme des réductions d’impôts destinées à soutenir la consommation, ne seront pas indolores non plus pour les finances publiques espagnoles. La dette publique, de 67 % du PIB en 1996, est passée, fin 2006, sous la barre symbolique des 40 %. La voilà repartie en sens inverse. De 1,5 %, le déficit public pourrait bondir à 4,5 % l’an prochain, estime
Maigre soulagement, s’il en était : l’inflation devrait se calmer. L’indice des prix à la consommation a flambé à 5 % en taux annuel en juillet dernier, est redescendu à 3,6 % en octobre et devrait ne plus être que de 1,8 % en 2009 puis de 1,5 % en 2010, pronostique l’OCDE, confirmant les craintes, répandues dans toute l’Europe, d’un tassement de l’inflation, voire – ce qui sera peut-être le cas momentanément dans certains pays – de déflation.
La guérison sera donc longue pour l’Espagne. Le pays, plus encore que certains de ses voisins européens, est confronté à l’arrêt de ses principaux moteurs. Heureusement, juge l’OCDE, il lui reste encore son commerce extérieur. Ce moteur devrait même être le premier à se remettre, avec une croissance estimée à 3,2 % en 2008, 3,7 % en 2009 et 5,6 % en 2010, nous dit-on. Un optimisme difficile à partager. Qu’exporte l’Espagne si ce n’est du vin, des fruits et légumes, un peu d’huile d’olive ? Même les autos Seat sont tombées dans le giron de Volkswagen. Et, si les exportations ont augmenté en valeur ces dernières années, le déficit commercial ibérique ne s’est pas réduit pour autant, au contraire. Enfin, l’Espagne commerce surtout avec la France et l’Allemagne. Compter sur ces partenaires serait aujourd’hui faire preuve d’une grande naïveté quant à leurs capacités respectives à se relever de la crise.
« Qui veut être riche en un an, au bout de six mois est pendu. » L’Espagne aurait dû relire son grand auteur, Miguel de Cervantes. Son eldorado est aujourd’hui aussi désertique de la campagne de la Mancha où déambulait l’idéaliste Don Quichotte.