France : la scoumoune…

Depuis trois mois, la France ne cesse de jouer de malchance. Tout a commencé en juin avec l’élimination de son équipe de football dès le premier tour de l’euro 2008. Ensuite ou plutôt au même moment (en l’occurrence le 13 juin), l’Irlande a rejeté le Traité de Lisbonne, coupant l’herbe sous le pied à toute décision importante qui aurait pu être votée lors de la Présidence française de l’Union européenne. Comme nous l’écrivions à l’époque, le seul grand événement marquant de cette dernière restera certainement l’illumination en bleu de la Tour Eiffel.

Celle-ci ne permettra cependant pas de faire oublier une autre avarie qu’a connue l’Hexagone lors de cet été, à savoir le temps exécrable dans la majorité de son territoire. A l’instar de l’an passé, cette météo calamiteuse n’a évidemment pas manqué de peser négativement sur l’activité touristique. Même si 42 % des Français n’ont pas pris de vacances, cette triste évolution dégradera encore un peu plus une croissance française en déconfiture.

Car, au-delà de toutes ces malchances, la principale déconvenue qu’a dernièrement connue l’Hexagone réside dans la baisse de 0,3 % de son PIB au cours du deuxième trimestre. Pis, l’évolution récente des indicateurs avancés de la conjoncture (que ce soit dans l’industrie, les services ou encore la construction) indique qu’une variation nulle ou négative du PIB est également sur le point d’être enregistrée au troisième trimestre.

Bref, si l’on ajoute à cette liste déjà longue de calamités, la dixième place de la France aux Jeux Olympiques (l’une de ses plus mauvaises performances depuis plus de vingt ans), ainsi que les pertes humaines de l’armée française en Afghanistan ou encore le peu de poids de la diplomatie française dans le conflit géorgien, il y a vraiment de quoi se poser la question : la France aurait-elle attrapé la scoumoune ?

Sans avoir, par définition, de réponse précise à cette question, mais pour au moins tenter de conjurer le mauvais sort et essayer de désamorcer une rentrée sociale qui s’annonce extrêmement chaude, nous aurions donc été en droit d’attendre que le gouvernement prenne une ou plusieurs mesures populaires consensuelles et surtout efficaces.

Mais non ! Peut-être par volonté de mettre de l’huile sur le feu, à moins que ce ne soit pour relancer la lutte des classes ou tout simplement par dilettantisme, la France a décidé d’augmenter encore la pression fiscale qui pèse sur son économie.

Ainsi, pour financer les quelque 1,3 milliard d’euros nécessités par la mise en place du Revenu de Solidarité Active (RSA), Nicolas Sarkozy en personne a annoncé l’augmentation de 1,1 % de la taxation des revenus du capital. Elle viendra donc s’ajouter aux 11 % de CSG, CRDS et tutti quanti déjà prélevés sur ces mêmes revenus. Autant d’impôts qui, rappelons-nous, lors de leur création ne devaient être que temporaires…

Autrement dit, en dépit d’une pression fiscale de presque 45 % du PIB (l’un des niveaux les plus élevés du monde), la France veut encore aller plus loin. Et ce, alors que, dans leur écrasante majorité, les autres pays occidentaux s’emploient à réduire cette ponction qui constitue d’ailleurs une fuite dans le circuit économique et réduit de facto la croissance structurelle.

En matière de fiscalité, le comble de cet été réside d’ailleurs dans le fait que le gouvernement espagnol (de gauche) a supprimé l’ISF, alors que le gouvernement français (a priori de droite) augmente la pression fiscale sur les revenus du capital. En termes de cohérence, il serait difficile de faire pire…

Et quand bien même le RSA serait l’idée géniale qui ferait reculer le chômage et le travail au noir, fallait-il vraiment augmenter les impôts pour le financer ? Une façon beaucoup plus simple et beaucoup moins coûteuse pour l’épargnant riche ou non (car n’oublions pas que la majorité des Français sont des épargnants modestes) aurait été de réduire les pléthoriques dépenses publiques, et notamment les dépenses de fonctionnement qui, depuis six ans, augmentent de 12 milliards d’euros par an (toutes administrations publiques confondues).

Mais, non ! Il ne faut surtout pas toucher aux prés-carrés de notre très chère (au sens propre du terme) administration. N’oublions pas que le pouvoir de nos élus et de nos hauts-fonctionnaires ne se résument pas à leurs émoluments, mais au nombre de personnes qu’ils ont sous leurs ordres. Leur demander de réduire ce dernier et plus globalement leurs dépenses de fonctionnement est donc bien trop douloureux.

Mieux vaut taxer le petit épargnant et plus globalement l’ensemble des Français. C’est comme ça que les différents gouvernements procèdent depuis trente ans, avec les résultats que l’on connaît.

Il ne faudra donc pas s’étonner si la récession qui a commencé dans l’Hexagone au deuxième trimestre se prolonge au moins jusqu’au printemps prochain. Scoumoune ou pas, nos dirigeants politiques l’auront bien cherché.

 Marc Touati