« Qui ne sait pas lire et vit avec un dollar par jour ne ressentira jamais les bienfaits de la mondialisation. »[1]
Donc un adulte sur cinq dans le monde est exclu de la mondialisation car analphabète, selon les chiffres de l’UNESCO[2].
Donc 1,2 milliard de personnes vivant sous le seuil de pauvreté avec moins de un dollar par jour sont évincées de la mondialisation.
Donc les continents africain, asiatique et sud-américain sont, pris dans leur globalité, sont les parents pauvres de la mondialisation.
Guère besoin d’expliquer l’acuité de cette citation qui remonte pourtant au mandat présidentiel de l’américain Jimmy Carter, au tournant des années
Mais il faut se résoudre à accepter que la mondialisation ne soit ni noire ni blanche. Elle est à l’œuvre avec ses bons et ses moins bons aspects : la création d’un univers commercial mondial sous la tutelle de l’OMC versus les émeutes de la faim ; le développement des places financières mondiales versus la crise des « subprimes » ; la découverte des cultures versus la montée en puissance des extrémismes rejetant toute homogénéisation…
La mondialisation est un processus complexe, si complexe que les élites qui la pilotent – si tant est que la mondialisation puisse être pilotée – ne le comprennent pas toujours. Les populations défavorisées dont nous parlons sont encore moins armées pour penser ce mouvement et a fortiori s’inscrire dedans. Seule une poignée d’individus dans les pays émergents tire son épingle du jeu – et plutôt bien d’ailleurs. Malheureusement ces réussites n’ont guère d’échos favorables sur le bien-être des populations. Jimmy Carter n’avait pas tort.
Pourtant, réfuter que la globalisation est source de progrès serait mentir. Malgré les injustices qu’elle crée, le principal bienfait de la mondialisation est de favoriser les évolutions institutionnelles, culturelles, juridiques, économiques… Ces progrès sont bien l’ordre de mission de grandes organisations internationales comme l’Organisation des Nations Unies et ses satellites (CNUCED, FAO…),
Avec un schéma directeur fort résumé sous le terme d’ « Objectifs du Millénaire pour le développement » (OMD), essentiels à atteindre d’ici à 2015 pour l’avènement d’un monde meilleur. Ces objectifs sont au nombre de huit : réduire l’extrême pauvreté et la faim ; assurer l’éducation primaire pour tous ; promouvoir l’égalité et l’autonomisation des femmes ; réduire la mortalité infantile ; améliorer la santé maternelle, combattre le VIH/Sida, le paludisme et d’autres maladies ; assurer un environnement durable ; et mettre en place un partenariat mondial pour le développement.
Certes, les promesses sont encore loin d’être tenues. D’aucuns diront que les inégalités sont croissantes du fait de la mondialisation. Mais la question des inégalités est différente de celle de la pauvreté et les inégalités peuvent progresser alors que la pauvreté diminue. Là encore, dresser un portrait monochrome de la mondialisation est une aberration. Les moyens humains et financiers, les volontés politiques sont au rendez-vous. Gageons que les efforts paient un jour.
Le sort de ces populations aurait-il été différent si la mondialisation n’avait pas eu cours ? On ne refera pas l’Histoire – et avec des « si », le cycle de Doha aurait été bouclé depuis bien longtemps. « L’important c’est de participer », dira-t-on en cette période olympique. Ce qui compte, c’est de savoir ce que l’on veut, où l’on va, les moyens que l’on se donne. La simplicité du message en est déroutante : le bien-être de tous passe par un juste et équitable partage des ressources, l’écoute et le respect de l’Autre et de l’environnement. Pour qu’un jour on puisse faire mentir Jimmy Carter.
Alexandra Voinchet
[1] Citation de Jimmy Carter, président des Etats-Unis de 1977 à 1981.
[2] Rapport mondial de suivi 2008 sur l’Education pour tous de l’UNESCO.