Décidemment, juillet 2008 constituera certainement l’un des plus mauvais mois que l’économie française ait connu depuis la récession de 1993. En effet, après la baisse de la production industrielle, la flambée du déficit extérieur, l’augmentation du déficit public, le repli de la consommation des ménages malgré les soldes, la chute du climat des affaires dans l’industrie, les services, le bâtiment et même le commerce de gros, c’est au tour de la confiance des ménages et des mises en chantier d’atteindre de nouveaux planchers.
Il faut reconnaître que, depuis le début 2008, l’évolution de l’indice de confiance des Français calculé par l’INSEE est devenue monotone : chaque mois, un nouveau plancher historique est atteint. Dès lors, chaque mois également, de nombreux observateurs économiques annoncent que le fond a été touché et qu’on ne pourra pas aller plus bas. Mais non, le fond a bien été atteint, mais désormais, on creuse…
Au-delà de la boutade, il faut malheureusement bien prendre conscience de l’état de fébrilité dans lequel se trouvent les ménages français actuellement. Ainsi, en reculant de deux points en juillet, à un niveau de – 48, l’indice de leur confiance, ou plutôt de leur défiance, se situe 15 points en deçà de son précédent plancher historique atteint en novembre 2005 et en décembre 1995. Comparativement à son niveau d’il y a tout juste un an, l’effondrement atteint 33 points. Une telle chute n’a évidemment jamais été observée dans l’histoire économique française.
Cette descente aux enfers s’explique principalement par la forte détérioration de la perception qu’ont les ménages français de leur situation financière passée et à venir et du niveau de vie en France. Certes, une légère hausse corrective de deux petits points a été observée en juillet sur les perspectives de situation financière personnelle, ce qui n’empêche néanmoins pas ces dernières de reculer de 20 points comparativement à leur niveau de juillet 2007.
Dans ce cadre, les ménages continuent d’annoncer une consommation en berne, l’indicateur de l’opportunité de faire des achats importants ayant stagné à son plus bas historique atteint en juin dernier à – 38, soit un effondrement de 35 points sur un an.
En fait, depuis trois mois, la seule nouveauté dans ce sombre tableau réside dans la forte augmentation des craintes de hausse du chômage. Après avoir déjà progressé de 15 points en mai-juin, celles-ci enregistrent une tension identique en juillet. Avec un niveau de 35 désormais, elles atteignent un sommet depuis mars 2006.
Pis, ces fortes inquiétudes sont corroborées par l’enquête trimestrielle de l’INSEE dans l’industrie, également publiée aujourd’hui. En effet, celle-ci montre tout d’abord que les carnets de commandes tant étrangers que globaux et tant passés que futurs s’effondrent littéralement. Les perspectives d’évolution de la demande globale chutent ainsi de 13 points sur un trimestre et de 22 points sur un an. En atteignant un niveau de – 7 en juillet, elles affichent ainsi un repli de 8 points par rapport à leur moyenne de longue période.
Conséquence logique de cette forte baisse de régime, les entreprises industrielles françaises annoncent une réduction massive des effectifs pour les trimestres à venir. L’indice de la tendance prévue des effectifs est ainsi passé de + 2 en octobre à 0 en janvier, puis – 2 en avril et enfin – 11 aujourd’hui.
Autrement dit, les ménages ont raison d’être aussi inquiets quant à l’emploi, car les licenciements et autres destructions d’emplois vont aller croissants dans les prochains mois, suscitant de nouvelles augmentations du taux de chômage, qui devrait repasser au-dessus de la barre des 7,5 % dès l’automne prochain (contre 7,2 % aujourd’hui).
Et ce, d’autant que la réduction des effectifs concernera l’industrie mais aussi la construction, comme l’indique le nouvel effondrement des mises en chantier en juin, dont le glissement annuel a même atteint – 28,2 %, un nouveau plus bas historique.
Bref, comme nous l’annonçons depuis déjà quelques mois et comme certains semblent aujourd’hui le découvrir, l’économie française est bien sur le chemin de la récession et tant la rentrée de septembre que la fin 2008 risquent de s’avérer bien difficiles.
Marc Touati