« Tout fout le camp !». Après les plus bas historiques atteints par la confiance des ménages depuis six mois, après la faiblesse de l’emploi au premier trimestre et après la chute de la consommation en produits manufacturés en mars-avril, c’est au tour des industriels français de jeter l’éponger.
En effet, après environ dix mois d’une résistance notable qui pouvait laisser imaginer que le pire serait évité, le climat des affaires dans l’industrie s’est lui aussi effondré, perdant quatre points sur le seul mois de mai et six points au cours des deux derniers mois. Avec un niveau actuel de 102, il se situe ainsi à un plus bas depuis décembre 2005, à une époque où la croissance du PIB français culminait à 1,7 %.
Pis, tous les indicateurs de l’enquête INSEE dans l’industrie ont subi une nette dégradation en mai. A commencer par les perspectives générales de production qui perdent six points en un mois et dix points en avril-mai. A – 15 désormais, elles retrouvent un plancher depuis août 2005. De même, les perspectives personnelles de production chutent de sept points sur le seul mois de mai, atteignant un plus bas depuis l’automne 2005.
Mais ce n’est malheureusement pas tout. Ainsi, l’indice des carnets de commandes globaux a perdu sept points en mai et affiche une dégringolade de douze points par rapport à mars 2008. Pour retrouver une chute aussi forte en si peu de temps, il faut remonter à l’été 2001…
En outre, habitués à une certaine résistance depuis un an, les carnets de commandes étrangers ont eux aussi fortement souffert en mai, perdant dix points en un seul mois et quatorze points depuis le début 2008. Autrement dit, la vigueur excessive de l’euro et le ralentissement de la croissance mondiale commencent à fortement peser sur l’industrie française.
D’un point de vue sectoriel, il faut également noter qu’à l’exception des biens d’équipement et de l’agro-alimentaire, qui résistent tant bien que mal, tous les pans de l’industrie française subissent une forte décrue en mai. Et ce, en particulier pour le secteur des biens de consommation, dans lequel les perspectives de production chutent de onze points en mai et de quinze points depuis février 2008.
La palme de la déconvenue revient néanmoins à l’industrie automobile dans laquelle les perspectives de production s’effondrent de 55 points sur le seul mois de mai. Du jamais vu depuis 1999.
En d’autres termes, la baisse de la consommation des derniers mois n’était pas un accident mais un mouvement durable. Tout au plus, son éventuelle résistance profitera avant tout aux biens importés.
Enfin, à côté de l’atonie industrielle, de la baisse de la consommation et de la faiblesse de l’activité dans les services (déjà observée depuis la fin 2007), le plongeon de la construction continue de s’aggraver. Ainsi, en avril, la baisse des mises en chantier a passé la vitesse supérieure, atteignant un glissement annuel de – 18,8 %, un plus bas historique. Cela rappelle étrangement l’écroulement récent des mises en chantier aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Espagne qui a automatiquement été suivi du dégonflement de la bulle immobilière. Chacun son tour…
Pour conclure, la bonne surprise du PIB de 2007 et début 2008 est bien de l’histoire ancienne. Il va désormais falloir composer avec une croissance très proche de zéro tant au deuxième qu’au troisième trimestre, et peut-être plus si le baril et l’euro ne baissent pas significativement dans les prochains mois. Bon courage à tous.
Marc Touati