Crise financière et spéculation.

         Les crises économiques et financières sont vieilles comme le capitalisme. La première bulle enregistrée par l’Histoire est « la crise des tulipes » de 1637, en Hollande. Plus récemment, nous avons connu la crise « asiatique » de 1997 et  la bulle internet de 2001.

            En fait, les crises sont diverses, dans leur origine et dans leur déroulement. Certaines sont liées aux matières premières (le pétrole en 1973 et 1979 ; le sucre en 1974) ; d’autres sont déclenchées dans un pays et se répandent par contagion au reste du monde (le Mexique en 1994, dont le défaut de paiement s’étendit aux autres pays d’Amérique latine endettés ; la Russie en 1998 qui souffrit des conséquences de la crise asiatique et dont les effets se firent sentir au Brésil, quelques mois plus tard, puis en Argentine). D’autres crises enfin, sont de nature bancaire au départ (crise « des subprimes » de 2007), puis s’élargissent à d’autres secteurs de la vie économique (crise boursière, hausse des prix des matières premières débouchant sur une crise alimentaire, etc.)

            Est-ce que la spéculation est la principale responsable ?

Certes, elle n’est jamais absente des mécanismes d’une crise financière. Il suffit de se rappeler « la banqueroute de Law » au début du dix-huitième siècle, due à une spéculation sur les terres du Mississipi ou « l’effondrement des assignats », à la fin de la Révolution française, provoqué en partie par une spéculation sur les biens des émigrés. Toutefois, la spéculation n’est pas le phénomène déclenchant ; elle intervient dans un processus déjà en mouvement. Ainsi, lors de la bulle internet, la spéculation est venue amplifier une tendance profonde à la survalorisation des sociétés issues d’un nouveau secteur télécommunication-informatique, appuyée sur un nouveau « business model » où le nombre de visiteurs d’un site était plus important que le chiffre d’affaires réel ou les bénéfices, d’ailleurs absents.

            Faut-il éliminer la spéculation financière ?

 La réponse est  négative. D’une part, il n’est pas évident d’instituer des règlementations, à la fois efficaces et non contraignantes (c’est-à-dire laissant suffisamment d’espace à l’esprit d’entreprise et d’innovation, qui est le moteur du système capitaliste). D’autre part, chaque crise ou bulle est spécifique, ainsi qu’on a pu le démontrer précédemment (l’origine, on l’a vu, peut être diverse : matières premières, dette publique, secteur bancaire ou méfiance généralisée) et, par conséquent les remèdes à mettre en œuvre varient dans le temps (on ne peut pas appliquer les solutions de la crise de 1929 à la crise des « subprimes ») et dans l’espace ( la crise asiatique a été surmontée grâce à des politiques d’ajustement différentes de celles utilisées en Russie ou en Argentine). Il faut donc apprendre à vivre avec la spéculation. Par contre, il faut renforcer « la réactivité » des Etats et des organismes internationaux, lorsqu’une crise éclate.

 

 

Bernard MAROIS

Président du club Finance HEC