Jeux Olympiques de Pékin : Les épreuves ont déjà commencé…

La cause tibétaine et à travers elle la question des droits de l’homme est désormais au cœur des 29èmes Jeux Olympiques qui auront lieu à Pékin du 8 au 24 Août.  Ces jeux n’ont pas encore commencé mais les épreuves sont déjà au rendez vous.

Tout d’abord le passage de la flamme à Paris a été un véritable fiasco. Les autorités françaises furent incapables de protéger ce symbole de l’olympisme, malgré les 3000 policiers et les quelques 400 000 Euros dépensés. De plus, le spectacle des autorités chinoises travaillant main dans la main avec la police française, et intervenant très vigoureusement auprès des manifestants, ne fut pas du meilleur effet. Ce triste épisode entache la réputation de la Chine (humiliée aux yeux du monde), de la France (incapable d’assurer une organisation efficace) et enfin des Jeux Olympiques, symboles de fraternité entre les peuples.

 

Nicolas Sarkozy se retrouve quant à lui dans une situation extrêmement délicate. Economiquement tout d’abord, la France n’est pas dans un rapport de force favorable avec la Chine. En effet, les 20 milliards de contrats signés et les contrats à venir pourraient être remis en cause si la situation s’envenimait. Au delà même de ces contrats,  la Chine est un partenaire économique indispensable pour la France. Notons qu’Angela Merkel ne se rendra pas à la cérémonie d’ouverture, mais l’Allemagne n’est pas du tout dans la même configuration économique. Les Allemands disposent de leurs fameuses machines outils indispensables à l’économie chinoise …

 

Sur le plan politique, Nicolas Sarkozy s’était beaucoup engagé sur la question des Droits de l’Homme pendant la campagne présidentielle, puisqu’il souhaitait « remettre les droits de l’homme au cœur de la politique ». Il penche désormais vers la « real politik » …. Il  lui faut donc arbitrer entre idéalisme politique et réalisme économique. D’ailleurs, la question tibétaine a provoqué quelques dissonances au sein du gouvernement. Ainsi, Rama Yade, jouant pleinement son rôle de secrétaire d’Etat  au Droits de l’Homme, a évoqué des « conditions » à imposer la Chine. Elle fut très vite recadrée par son ministre de tutelle Bernard Kouchner. Lui même se retrouve dans une position bien inconfortable puisqu’il ne peut directement s’opposer à la position du Président qui a décidé de temporiser. De fait, Nicolas Sarkozy demande une reprise du dialogue entre Pékin et le Dalai-Lama avant de prendre une décision relative à la participation de la France à la cérémonie d’ouverture. Mais le fait de « réserver » sa réponse peut déjà représenter  un affront pour Pékin avec qui le Président avait  noué de bonnes relations lors de sa dernière visite (sans Rama Yade).

 

Les Français – quant à eux – sont 62 % à ne pas craindre les représailles de la Chine (ce qui prouve leur déficit de culture macroéconomique), et sont  favorables (67%) à un boycott de la cérémonie si la situation au Tibet devait se dégrader. Enfin, 53% sont globalement en phase avec la position de Nicolas Sarkozy à propos de la cérémonie d’ouverture (Opinion Way LCI le Figaro). C’est malheureusement ce qui pourrait se produire, car la propagande chinoise contre le Dalai-Lama (qui n’a d’ailleurs jamais demandé l’indépendance du Tibet) a été telle qu’il deviendra difficile de revenir en arrière. En effet, l’opinion publique chinoise est extrêmement  remontée et  les Chinois adoptent des réflexes nationalistes. Sans vouloir faire preuve d’un pessimisme exacerbé, il a donc peu de chance pour que le parti communiste chinois et les valeurs tibétaines trouvent un terrain d’entente…

 

Si les politiques sont sur le devant de la scène, le CIO (Comité International Olympique) ne joue absolument pas son rôle. N’oublions pas qu’en 2001, lorsqu’il avait attribué les Jeux à Pékin, il avait promis qu’il rappellerait à la Chine ses devoirs en matière de droits de l’homme … Force est de constater que sur ce point, le CIO manque à ses devoirs et annihile les espoirs d’une partie de l’opinion publique qui espérait que les Jeux pourraient exposer la Chine et peut être la faire évoluer en matière de droits de l’homme et de respect des libertés individuelles.

 

Tout ce spectacle est navrant pour les Jeux Olympiques qui restent un symbole de paix, mais avant tout la grande fête du sport sur les cinq continents. Mais les exemples du passé (Moscou en 1980) nous ont montrés qu’il était utopique de vouloir dissocier les jeux de toute contingence politique ou économique.   

 

La phrase de la semaine :

« Vous croyez que cela m’amuse de ne pas pouvoir dénoncer tout ce que je sais, c’est comme ça il faut prendre sur soi » de Bernard Kouchner, Ministre des affaires étrangères (LCI).

 

rôme Boué