France : de mal en pis…

Encore une semaine difficile pour l’économie française : si la confiance des industriels a miraculeusement augmenté, celle des entreprises dans les services a poursuivi son plongeon, la confiance des ménages en a fait de même et le déficit public a atteint 2,7 % du PIB, se dirigeant tranquillement vers la barre des 3 % pour 2008. Plus les mois passent, plus l’équation s’annonce donc difficile pour nos dirigeants politiques mais aussi pour l’ensemble des citoyens français qui continuent donc de broyer du noir.

Une première question se pose alors : où s’arrêtera la descente aux enfers de la confiance des ménages français ? En effet, après avoir déjà plongé de 22 points entre juillet et janvier derniers, puis s’être stabilisé en février à un niveau historiquement bas de – 35, l’indice du moral des Français calculé par l’INSEE a encore perdu 1 point en mars, atteignant donc un nouveau plancher jamais observé depuis que cette enquête existe, c’est-à-dire 1987 !

Autrement dit, à l’inverse des industriels qui restent relativement optimistes malgré la crise économico-financière environnante, les ménages sont de plus en plus pessimistes en dépit de la baisse du chômage ! A croire que ces derniers seraient plus clairvoyants que les premiers…

Pis, les principaux indicateurs de l’enquête menée auprès des ménages continuent de se détériorer. A commencer par les indices relatifs à l’évolution passée de la situation financière personnelle et du niveau de vie en France qui atteignent de nouveaux plus bas en mars. Seul réconfort, les indices de perspectives dans ces deux domaines cessent de se dégrader mais restent néanmoins sur des niveaux extrêmement bas.

Ce pessimisme désormais structurel en matière de niveau de vie tranche d’ailleurs avec la version définitive des comptes nationaux du quatrième trimestre qui annonce une augmentation annuelle du revenu disponible brut de 3,3 % en 2007. Forcément, il s’agit là d’une moyenne qui ne reflète absolument pas le décalage croissant qui s’installe entre les différentes catégories sociales de la population française.

En outre et surtout, l’indice décrivant la volonté des ménages de faire des achats importants se replie encore de 2 points en mars, subissant ainsi un effondrement de 24 points depuis juillet dernier. En d’autres termes, après avoir résisté tant bien que mal, la consommation des ménages devrait désormais souffrir nettement. Et pour cause : cette dernière a jusqu’à présent été massivement soutenue par la forte augmentation de l’endettement des particuliers. Maintenant que ces derniers ont épuisé toutes leurs cartouches en la matière et que les banques vont devenir plus parcimonieuses dans l’octroi de crédit, il est clair que le château de cartes ne tiendra plus…

Dans ce cadre, sachant qu’en plus de la baisse de la confiance des ménages, le climat des affaires dans les services selon l’INSEE continue également de chuter (les perspectives dans ce secteur d’activité sont même sur un plus bas depuis la fin 2003), nous confirmons notre prévision d’une croissance du PIB de 1,4 % cette année.

Cette triste performance n’arrangera évidemment pas les choses en matière de déficit public, qui a donc été relevé à 2,7 % du PIB en 2007 (contre 2,4 % en 2006 et également 2,4 % annoncé pour 2007 il y a à peine un mois !). Ce nouveau creusement du déficit public s’explique notamment par la sempiternelle augmentation des dépenses de fonctionnement. Ces dernières ont encore progressé de 12 milliards d’euros, soit un niveau équivalent à son accroissement moyen déjà observé au cours des cinq années précédentes. Autrement dit, les réductions tant annoncées par nos dirigeants politiques de réduction des dépenses de fonctionnement n’ont pas eu lieu !

Or, si sur les six dernières années, les administrations publiques avaient justement tenu leurs promesses et économisé ces dépenses inutiles, elles auraient dégagé une économie d’environ 70 milliards d’euros, de quoi évidemment faire des heureux en matière de baisse de la pression fiscale. Non, les caisses ne sont pas vides, elles sont simplement mal utilisées.

Et comme, selon toute vraisemblance, elles le seront encore cette année, le déficit public devrait avoisiner les 3 % du PIB en 2008 et la dette publique atteindre au moins 68 % ! Pour être encore plus clair : la France va prendre la présidence de l’Union européenne en juillet prochain avec une triple casquette bien peu réjouissante : une des plus mauvaises performances de croissance de la zone euro (heureusement qu’avec son petit 0,7 % l’Italie nous évitera la dernière place…), un déficit public qui atteindra de nouveau la frontière de Maastricht et une dette publique qui dépassera de presque dix points son niveau autorisé par le pacte de stabilité.

Une question se pose alors : l’adversité incitera-t-elle les dirigeants français à engager (enfin !) la France sur le chemin de la modernisation économique ou bien, au contraire, constituera-t-elle un frein à l’avènement des réformes structurelles tant annoncées et tant oubliées ?

La réponse n’est pas encore claire mais, malheureusement, il faut reconnaître que la deuxième solution ne cesse de gagner du terrain…

 Marc Touati