La croissance recule partout, surtout en France et dans la zone euro.

A une semaine d’intervalle, la Banque Centrale Européenne (BCE) et la Réserve fédérale américaine (Fed) ont fait part de leurs inquiétudes sur l’avenir de la croissance des deux côtés de l’Atlantique.

Et ce, à juste titre, en particulier dans la zone euro, qui paraît beaucoup plus en danger que les Etats-Unis.

En effet, si la Fed a annoncé qu’elle ne remonterait plus son taux objectif des federal funds en 2019 cela paraît exagérément accommodant au regard de la croissance américaine, qui reste et restera proche de 3 % cette année, mais aussi du taux de chômage de plein-emploi qui prévaut outre-Atlantique depuis bientôt deux ans.

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L’arrêt du resserrement monétaire de la Fed apparaît trop accommodant, non seulement au regard de la croissance américaine…

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Sources : BEA, Federal Reserve, ACDEFI

De ce point de vue, il aurait donc été encore possible pour la Fed d’augmenter encore son taux objectif des federal funds à 3 % d’ici l’été, de manière à pouvoir ensuite le rebaisser lors du prochain fort ralentissement de l’économie américaine, qui finira forcément par arriver d’ici la fin 2019-début 2020.

Cet excès de « bonté » est encore plus flagrant au regard de l’évolution récente des marchés boursiers.

En effet, si la bulle qui s’était formée sur ces derniers depuis 2017 s’est nettement dégonflée d’octobre à décembre 2018, elle s’est rapidement reformée depuis le début 2019.

Pour autant, le discours de prudence de la Fed et de la BCE ont été perçu par les marchés comme un aveu d’inquiétude, voire de panique, des deux principales banques centrales de la planète, qui paraissent d’ores et déjà bien dépourvues face à l’avènement d’une prochaine et inévitable crise de croissance au cours des prochains trimestres.

…Et surtout face au regonflement de la bulle boursière.

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Sources : Federal Reserve, ACDEFI

Toujours est-il qu’en attendant cette prochaine crise, le changement de discours de la Fed a permis aux taux obligataires américains de repartir à la baisse, consacrant désormais une courbe des taux plates.

Et pour cause : tout comme le taux objectif des federal funds, le taux d’intérêt des Bonds à 10 ans se stabilise désormais à 2,5 %.

La courbe des taux américains est plate.

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Sources : Federal Reserve, ACDEFI

En dépit de ce repli, l’écart entre le taux d’intérêt à dix ans du Bond américain et celui du Bund allemand demeure impressionnant, puisque ce dernier est tombé en territoire négatif, à – 0,02 % le 22 mars 2019, un plus bas depuis le 4 octobre 2016 et surtout un niveau qui laisse anticiper une stagnation économique durable en Allemagne, voire dans l’ensemble de la zone euro.

Taux longs : quasiment 250 points de base d’écart entre les Etats-Unis et l’Allemagne.

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Source : ACDEFI

Et, malheureusement, les indicateurs avancés publiés ces derniers jours ont confirmé que l’économie de la zone euro demeurait bien en souffrance. Certes, après avoir déjà gagné 5,4 points de décembre 2018 à février 2019, l’indice ZEW de sentiment économique dans la zone euro a étonnamment bondi de 14,1 points en mars. S’il s’agit évidemment d’une bonne nouvelle, il faut néanmoins souligner qu’avec un niveau actuel de – 2,5, il demeure encore très bas et annonce toujours une nette régression du glissement annuel du PIB eurolandais pour le premier semestre 2019.

Zone euro : l’indice ZEW se redresse, mais reste encore très bas.

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Sources : Eurostat, ZEW, ACDEFI

Une perspective largement confirmée par les indicateurs Markit PMI des directeurs d’achat.

Ainsi, dans l’industrie, après être déjà passé sous la barre des 50 en février, l’indice PMI a chuté de 1,7 point sur le seul mois de mars. Avec un niveau de 47,6, il accuse un plongeon de 13 points en quinze mois et tombe à un plus bas depuis avril 2013.

Zone euro : l’indice PMI dans l’industrie a chuté de 13 points en 15 mois et tombe à un plancher depuis avril 2013.

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Sources : Eurostat, Markit, ACDEFI

Certes, dans les services, l’indice PMI n’a perdu que 0,1 point en mars. Mais cela n’a pas permis de compenser la chute de l’indice PMI dans l’industrie, ce qui a entraîné une baisse de 0,6 point de l’indice « composite » à 51,3.

Une croissance eurolandaise de 0 % d’ici l’été 2019.

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Sources : Eurostat, Markit, ACDEFI

Dans ce cadre, et comme le montre le graphique ci-avant, le glissement annuel du PIB de la zone euro devrait bien tomber vers le zéro pointé d’ici l’été 2019.

Une situation relativement analogue se présente pour l’économie allemande. En pire dans l’industrie et en léger mieux pour les services. Les indices Markit PMI allemands sont ainsi tombés à respectivement 44,7 et 54,9. Ce qui se traduit par un indice composite de 51,5.

Avec un indice au plus bas depuis août 2012, l’industrie allemande continue donc sa « descente aux enfers », qui apparaît de plus en plus dramatique.

L’Allemagne reste en souffrance.

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Sources : Destatis, Markit, ACDEFI

La situation est encore plus inquiétante en France. En effet, après un petit répit en février, les indices Markit PMI des directeurs d’achat sont repartis à la baisse en mars, repassant sous la barre des 50. En l’occurrence, à 49,8 dans l’industrie et à 48,7 dans les services.

Le glissement annuel du PIB français devrait avoisiner 0 % d’ici l’été prochain.

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Sources : INSEE, Markit, ACDEFI

Autrement dit, bien loin des annonces de l’INSEE et de la Banque de France qui veulent laisser croire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes pour l’économie hexagonale, le glissement annuel du PIB français devrait bien avoisiner 0 % d’ici l’été prochain.

Marc Touati