Conjoncture : l’Allemagne plonge, la France stagne et les Etats-Unis se redressent. Cherchez l’erreur…

Après douze mois de dégringolade quasiment ininterrompue, les indicateurs avancés de la zone euro ont plus ou moins stoppé leur « descente aux enfers » en février 2019.

Pour autant, il ne faut pas rêver, ils restent encore sur des niveaux extrêmement bas, qui ne permettent malheureusement pas d’annoncer un net rebond de la croissance eurolandaise pour les prochains trimestres.

Premier exemple de ce climat délétère mais un peu moins que par le passé, l’indice ZEW relatif aux perspectives d’activité de la zone euro a légèrement relevé la tête en février, passant de – 20,9 en janvier à désormais – 16,6. Il reste donc toujours très nettement en territoire négatif et confirme que la baisse de la croissance eurolandaise est loin d’être terminée.

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Zone euro : l’indice ZEW ne baisse plus mais reste très bas et confirme la poursuite de la baisse de la croissance eurolandaise.

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Sources : Eurostat, ZEW, ACDEFI

Il en est de même pour les indices Markit PMI des directeurs d’achat. Avec néanmoins une information supplémentaire : l’augmentation de l’écart entre l’activité industrielle qui s’effondre et celle dans les services qui se redresse.

Ainsi, en février, l’indice Markit PMI dans l’industrie de la zone euro a perdu 1,3 point, passant sous la barre des 50 pour la première fois depuis juin 2013. Avec un niveau de 49,2, il accuse ainsi un plongeon spectaculaire de .11,3 points depuis son précédent point haut de décembre 2017.

Soyons clairs : un tel effondrement en si peu de temps n’a plus été observé depuis la récession de 2011. Ce qui annonce, malheureusement, la poursuite du fort ralentissement de la croissance eurolandaise pour les prochains trimestres.

L’activité s’effondre dans l’industrie et s’améliore légèrement dans les services.

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Sources : Eurostat, Markit, ACDEFI

Certes, l’indice Markit PMI dans les services a augmenté de 1,1 point en février, remontant à 52,3. Mais, il faut être réaliste, ce léger mieux sera insuffisant pour permettre à la croissance eurolandaise de redémarrer à moyen terme.

Vers une croissance eurolandaise de 0 % d’ici l’été prochain.

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Sources : Eurostat, Markit, ACDEFI

C’est d’ailleurs ce qui ressort de l’évolution de l’indice Markit « composite » qui a gagné 0,4 point en février, mais qui, avec un niveau de 51,4, annonce toujours le recul du glissement annuel du PIB eurolandais vers 0 % d’ici l’été prochain.

Cette dichotomie « industrie-services » est encore plus marquée en Allemagne. Et pour cause : en février, l’indice Markit dans l’industrie allemande a plongé de 2,1 points. Avec un niveau de 47,6, il atteint un plancher depuis décembre 2012.

Cette chute est tellement impressionnante qu’elle obère la remontée surprenante de 2,1 points de l’indice équivalent dans les services, qui sera d’ailleurs insuffisante pour permettre à l’économie germanique de retrouver le chemin de la croissance soutenue avant longtemps.

Allemagne : l’industrie plonge encore, mais les services sauvent les meubles.

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Sources : Destatis, Markit, ACDEFI

Encore plus inquiétant, l’indice IFO du climat des affaires, qui constitue l’un des meilleurs indicateurs avancés de la croissance allemande, a poursuivi sa forte chute en février.

Ainsi, après avoir déjà régressé de 4,7 points depuis août dernier, celui-ci en a encore perdu 0,6 en février, ce qui porte à 6,7 points se dégringolade depuis son précédent point haut de novembre 2017.

Avec désormais un niveau de 98,5, il se situe 1,5 point en deçà de sa moyenne de long terme et atteint un plancher depuis décembre 2014.

Comme le montre le graphique ci-après, cette forte décrue indique que la croissance risque de reculer encore nettement outre-Rhin.

Autrement dit, après être déjà passé de 2,8 % au quatrième trimestre 2017 à 0,6 % au quatrième trimestre 2018, le glissement annuel du PIB allemand devrait rapidement tomber à 0 %, voire encore plus bas.

A l’évidence, l’économie allemande n’a plus le vent en poupe.

L’indice IFO du climat des affaires baisse encore et atteint un plancher depuis décembre 2014.

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Sources : Destatis, IFO, ACDEFI

Une analyse malheureusement renforcée par l’indice IFO des perspectives d’activité, qui, en février, est tombé à 93,8, subissant une chute de 10,1 points depuis novembre 2017 et atteignant un plus bas depuis novembre 2012.

La corrélation entre cet indicateur avancé et le glissement annuel du PIB allemand montre que ce dernier pourrait passer en territoire négatif dès le premier semestre 2019.

Vers un glissement annuel du PIB allemand négatif d’ici l’été prochain…

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Sources : Destatis, IFO, ACDEFI

Dans la mesure où l’Allemagne réalise 30 % du PIB de la zone euro chaque année, il est clair que ce déclin aura des répercussions dramatiques pour tous les membres de l’UEM.

En attendant et aussi bizarre que cela puisse paraître, il faut reconnaître que la situation française apparaît meilleure que celle de l’Allemagne. En effet, en février, l’indice INSEE du climat des affaires a augmenté de 0,5 point, à 102,9.

France : l’indice INSEE du climat des affaires ne baisse plus.

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Sources : INSEE, ACDEFI

De même, l’indice Markit des directeurs d’achat dans l’industrie française a continué de s’améliorer, augmentant de 0,2 point à 51,4. Quant à son homologue dans les services, il a également progressé, mais est resté sous la barre des 50, à 49,8 précisément. Pour autant, ne rêvons pas : ces niveaux sont malheureusement insuffisants pour permettre d’éviter le retour de la croissance zéro en France au cours des deux prochains trimestres.

France : l’industrie résiste et les services continuent de souffrir.

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Sources : INSEE, Markit, ACDEFI

Enfin, pour finir ce tour d’horizon occidental des indicateurs avancés et comme cela s’était déjà observé en janvier, mais aussi depuis l’été dernier, l’économie américaine a continué de se démarquer positivement.

En effet, tandis que le retour de la croissance zéro ne fait plus de doute en Allemagne, en France et dans l’ensemble de la zone euro, les indicateurs Markit américains confirment que la croissance de l’Oncle Sam restera en pleine forme au cours des prochains trimestres.

Certes, en février l’indice « industrie » a reculé de 1,2 point. Néanmoins, avec un niveau de 53,7, il demeure très appréciable. Et ce d’autant que son homologue dans les services a bondi de 2 points sur le seul mois de février, atteignant 56,2.

La croissance américaine continue de surprendre par sa vigoureuse résistance.

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Sources : BEA, Markit, ACDEFI

Des niveaux qui montrent qu’après le « shutdown » et en dépit des effets négatifs de ce dernier, la croissance américaine devrait se stabiliser durablement autour des 2,5 %, soit très loin du zéro pointé de la zone euro…

Marc Touati