En 2019, le « bear market » devrait encore l’emporter.

Après trois années consécutives de hausse pour le Cac 40, deux pour le Dow Jones, les indices phares de la bourse de Paris et de celle de New York ont connu une nette baisse en 2018 : respectivement – 10,9 % et – 5,6 %. Il ne s’agit d’ailleurs là que des diminutions calculées en glissement annuel au 31 décembre. Si l’on observe les variations entre le plus haut et le plus bas annuel, la sanction est beaucoup plus sévère, en l’occurrence – 19,4 % tant pour Paris que pour New York.

Pour retrouver des résultats annuels encore plus mauvais, il faut remonter à 2011 pour le Cac 40 : – 16,9 % du 1er janvier au 31 décembre et – 35,4 % entre le plus haut et le plus bas. Quant au Dow Jones, il n’avait pas autant souffert depuis 2008 : respectivement – 33,8 % et – 44,6 %.

Face à de telles déconvenues et à la remontée observée lors des premiers jours de l’année 2019, il pourrait être tentant de penser que le plus dur est passé et qu’un soleil radieux va désormais briller sur les bourses internationales et notamment sur celles de Paris et de New York.

Malheureusement, il n’en est rien. En effet, le rebond entamé depuis le 27 décembre est avant tout une correction de la forte baisse des semaines précédentes et sera lui-même suivi d’un repli correctif tout aussi virulent que celui de l’automne 2018. Et pour cause : les risques de l’an passé n’ont absolument pas disparu, ils se sont même aggravés.

Certes, la croissance et le marché du travail américains restent dynamiques, mais n’oublions pas que l’emploi est une variable retardée de l’activité et que les indicateurs avancés dénotent un ralentissement de la croissance de l’Oncle Sam pour les trimestres à venir.

De plus, même si cette dernière devrait avoisiner les 2,2 % cette année, soulignons que cela ne représentera une contribution à la croissance mondiale que d’environ 0,3 point. L’essentiel de la dynamique mondiale viendra de Chine et d’Inde, qui, comme nous l’avons vu la semaine dernière dans nos prévisions 2019, devraient ralentir et contribuer à hauteur de respectivement 1,1 et 0,5 point à la progression annuelle du PIB planétaire. Cette dernière devrait donc bien avoisiner les 2,8 %, soit au moins 0,5 point de moins qu’en 2018.

Or, si déjà avec un ralentissement mesuré l’an passé, les marchés boursiers ont décliné, à plus forte raison vont-ils enfoncer le clou cette année avec une décélération encore plus forte de la croissance mondiale.

Mais, pour être tout à fait franc, même avec un niveau de 2,8 % pour cette dernière, les marchés boursiers auraient normalement de quoi éviter le pire. Le problème est qu’ils vont forcément pâtir de deux grandes menaces. La première réside dans l’exacerbation des tensions protectionnistes.

N’oublions effectivement pas que pour atteindre environ 3 %, la croissance mondiale a besoin d’une augmentation des échanges internationaux de l’ordre de 10 %. Si le protectionnisme l’emporte, il est clair qu’un tel niveau ne sera pas atteint, voire sera remplacé par une variation négative du commerce mondial, qui entachera forcément et massivement l’activité économique internationale.

Compte tenu des liens étroits (en dépit des apparences) entre la Chine et les Etats-Unis, gageons cependant qu’un accord, certainement imparfait, sera finalement trouvé.

Mais, malheureusement, la vraie menace n’est pas là, elle se situe plutôt du côté de la zone euro, qui risque de connaître une nouvelle crise existentielle au cours des prochains trimestres.

Or, si l’UEM n’est plus un havre de stabilité, les taux d’intérêt des obligations des Etats en difficulté, à commencer par ceux de l’Italie et de la France, vont nettement augmenter, ce qui cassera encore un peu plus l’activité, aggravera le chômage et les déficits publics, donc la dette, ce qui finira, une fois encore, par alimenter la hausse des taux d’intérêt obligataires, grevant encore la croissance et le cercle pernicieux continuera…

Face à une telle déflagration, il est clair que les marchés boursiers ne pourront pas résister et subiront une nouvelle tempête dévastatrice au cours de l’année en cours.

Bref, le monde est assis sur un baril de poudre. La question est simplement de savoir qui sera le détonateur de la prochaine crise : l’Italie ou la France ? Dans les deux cas, ce serait un Lehman Brothers puissance 10 ou 20. Un krach obligataire et boursier s’ensuivrait donc, entraînant la planète dans une récession dramatique.

Car, si en 2008, les autorités monétaires et budgétaires internationales ont pu agir et sortir l’artillerie lourde pour éviter le désastre, elles n’ont aujourd’hui plus de munition. Relance pharaonique, baisse des taux d’intérêt, planche à billets. Tout a déjà été utilisé.

En conclusion, même si nous ne sommes pas devins, nous anticipons qu’en toute logique, compte tenu des fondamentaux économico-financiers internationaux, mais surtout des graves risques qui menacent la stabilité de la zone euro, la crise qui a déjà débuté en 2018 va s’intensifier en 2019.

Restez donc liquides, vendez vos obligations d’Etat, éventuellement investissez à long terme, par exemple dans la pierre ou dans de belles entreprises et surtout Carpe Diem : profitez de l’instant présent.

Marc Touati