Croissance : la Chine et les Etats-Unis s’accrochent, la zone euro décroche.

Une fois encore, la Chine a déjoué tous les pronostics, y compris ceux du gouvernement qui avait annoncé une nette décélération de la croissance chinoise pour la fin 2017 et le début 2018. Et bien non ! Finalement, l’économie chinoise n’a même pas ralenti, ni au quatrième trimestre 2017, ni au premier de 2018.

En effet, son PIB a augmenté de respectivement 1,6 % et 1,4 %, permettant à son glissement annuel de se stabiliser à 6,8 %. Et si la fiabilité de ces statistiques laisse évidemment à désirer, il faut reconnaître que la résistance de l’économie chinoise constitue une bonne nouvelle dans un environnement international fragile.

La Chine demeure ainsi la locomotive du monde émergent, mais aussi de l’économie planétaire. La contribution de la Chine à la croissance mondiale devrait encore s’établir autour de 1,2 point cette année sur un total de 3,2 % (selon nos prévisions, qui sont, certes, inférieures de 0,7 point à celles du FMI).

A titre de comparaison, la contribution de l’Inde devrait avoisiner 0,4 point, celle des Etats-Unis 0,3 point et celle de la zone euro 0,2 point.

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La croissance chinoise se stabilise à 6,8 % au premier trimestre 2018 et le yuan/dollar autour des 6,28.

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Sources : NBSC, ACDEFI

Cette belle résistance de l’économie chinoise a permis au yuan/dollar de se stabiliser autour des 6,28, ce qui est certes un niveau élevé, mais toujours très loin du niveau de la parité des pouvoirs d’achat de 3,50 yuans pour un dollar.

Toujours est-il qu’à cause de l’appréciation du yuan en 2017, la balance commerciale chinoise ne cesse de souffrir. En mars 2018, elle a même dégagé un déficit de 4,98 milliards de dollars, le premier depuis février 2017. Après un rebond technique en février 2018, l’excédent commercial chinois sur douze mois a ainsi repris le chemin de la hausse en mars, atteignant 421,16 milliards de dollars, soit une baisse de 196,95 milliards de dollars par rapport au sommet de juillet 2016.

Déficit surprise pour la balance commerciale chinoise en mars.

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Sources : NBSC, ACDEFI

Dans le même temps, le glissement annuel de la production industrielle chinoise a reculé à 6,0 %, un plus bas depuis août 2017.

Fort heureusement, défiant là aussi les prévisions consensuelles, les ventes au détail sont restées particulièrement dynamiques en mars. Leur glissement annuel a même augmenté de 0,4 point, atteignant 10,1 %, un plus haut depuis novembre 2017.

La production industrielle ralentit, mais les ventes au détail se redressent.

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Sources : NBSC, ACDEFI

Si nous restons loin de la vigueur des années 2006-2007 ou 2010-2011, ces performances montrent néanmoins que l’économie chinoise peut à la fois compter sur un appareil productif à toute épreuve et sur une consommation hors-pair.

De plus, comme l’expliquons dans notre « Humeur », l’économie chinoise pourra toujours compter sur des réserves de changes de plus de 3 100 milliards de dollars pour affronter les dangers à venir.

La Chine pourra encore compter sur des réserves de changes pléthoriques pour affronter les dangers.

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Sources : NBSC, ACDEFI

Au total, nous estimons qu’en dépit d’un inévitable ralentissement, la croissance chinoise avoisinera les 6,5 % en moyenne sur l’année 2018.

Si les Etats-Unis sont évidemment loin de cette dynamique, force est de constater que les mesures fiscales de Donald Trump portent leurs fruits et maintiennent l’économie américaine sur un sentier de croissance appréciable. Ainsi, en mars, les mises en chantier et les permis de construire ont fortement progressé : respectivement + 1,9 % et + 2,5 %. Si ces performances ne permettent pas de compenser les fortes baisses de février, qui étaient d’ailleurs des effets de correction de la vigueur passée, elles montrent que le secteur de la construction continue de bien résister outre-Atlantique, malgré l’augmentation des taux d’intérêt monétaires, obligataires et hypothécaires.

De même, après trois mois d’atonie, qui faisaient suite à trois mois de forte vigueur, les ventes au détail ont repris le chemin de la hausse en mars. Elles ont ainsi progressé de 0,6 % sur un mois et de 4,6 % en glissement annuel. S’il ne s’agit que d’un plus haut depuis décembre dernier, cela montre que la consommation des ménages américains devrait rester très honorable.

Etats-Unis : les consommateurs américains font de la résistance.

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Sources : BEA, Census Bureau, ACDEFI

De même, après avoir déjà bondi de 1 % en février, la production industrielle américaine a encore augmenté de 0,5 % en mars, maintenant son glissement annuel à 4,3 %, un plus haut depuis janvier 2011.

Après un petit à-coup au premier trimestre 2018, la croissance américaine pourrait ainsi surprendre au deuxième trimestre, en dépassant les 2,5 % en glissement annuel.

La production industrielle américaine au beau fixe.

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Sources : BEA, Federal Reserve, ACDEFI

Au total, nous maintenons néanmoins notre prévision d’une croissance annuelle moyenne de 2,2 % aux Etats-Unis en 2018, après 2,3 % l’an passé.

En revanche, malheureusement très loin de la résistance américaine, et a fortiori de celle de l’économie chinoise, la zone euro a continué de décevoir et d’inquiéter pour l’avenir de sa croissance.

Zone euro : l’indice ZEW s’effondre en avril et atteint un plus bas depuis juillet 2016.

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Sources : Eurostat, ZEW, ACDEFI

Ainsi, après la forte baisse des indices Markit, Sentix et de la Commission européenne, l’indice ZEW a confirmé le fort ralentissement actuel et à venir de l’économie eurolandaise.

En effet, après avoir déjà chuté de 15,9 points en mars, l’indice ZEW des perspectives d’activité dans la zone euro en a encore perdus 11,5 en avril.

Au cours des trois derniers mois, son effondrement atteint 29,9 points.

Avec un niveau de 1,9, il se situe désormais à un plus bas depuis juillet 2016 et qui n’a ensuite été dépassé qu’en novembre 2012. A l’époque, le glissement annuel du PIB de la zone euro était de – 1 %. C’est dire combien la croissance de cette dernière apparaît menacée.

Renforçant cette inquiétude, la production dans le secteur de la construction a baissé de 0,5 % en février, après avoir déjà reculé de 0,8 % en janvier. Son glissement annuel est ainsi tombé à 0,1 %. Pour retrouver des niveaux inférieurs, il faut remonter à janvier 2017, puis à décembre 2015.

Zone euro et France : la production dans la construction s’effondre.

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Sources : Eurostat, ACDEFI

En France, la dégringolade est encore plus forte, puisque son glissement annuel atteint – 2,9 %, un plancher depuis janvier 2017.

Si, pour le moment, nous ne révisions pas encore à la baisse nos prévisions de croissance pour la zone euro et la France, il est clair que la probabilité de « performances » de croissance de respectivement 2 % et 1,4 % pour 2018 se réduit dangereusement.

Marc Touati